• Paris, 2034. La ville se reconstruit après de terribles attentats. Clarissa vient de quitter son mari ; elle trouve refuge dans une résidence ultramoderne et sécurisée, réservée aux artistes, fraichement construite sur les lieux du drame. A mesure qu'elle apprend à vivre avec sa nouvelle assistante - une intelligence artificielle qu'elle choisit d'appeler Mrs Dalloway, elle devient méfiante. Elle se sent épiée, utilisée même, piégée par l'équipe scientifique qui régit ce qui lui semblait l'endroit parfait pour tourner la page. Car Clarissa est écrivaine, et s'il y a bien quelque chose qui manque aux intelligences artificielles, c'est la capacité à créer. Craintes fondées ou paranoïa ? Ses proches penchent pour la deuxième option : Clarissa se retrouve seule, presque seule.

    Tatiana de Rosnay, Les Fleurs de l'ombre Ce qui saute aux yeux, dès les premières pages, ce sont ces éléments typiques aux romans de Tatiana de Rosnay que l'on retrouve :  l'obsession pour les lieux et la porosité entre ces lieux et les humains qui les habitent, sa passion pour Virginia Woolf et Romain Gary, et la dichotomie franco-britannique du personnage principal (au point qu'on en vient à penser que Clarissa, c'est vraiment un peu Tatiana). Mais s'il y a bien un sujet dans lequel on ne l'attendrait pas, ce sont les robots. Elle installe son personnage dans un futur très proche, campe un univers et une temporalité si bien structurée en fonction des problématiques actuelles qu'on s'y croirait vraiment. En 2034 chez Tatiana de Rosnay, tout a progressé : le terrorisme, bien sûr, le réchauffement climatique, et la science. Si toute la réflexion menée sur les robots et l'automatisation de la vie, mise en parallèle avec le récit de la séparation, fonctionne bien, on regrette peut-être les tirades faciles sur les jeunes et leurs écrans : l'humain n'a pas en soi vraiment changé, ce qui n'étonnera personne.

    D'autres sujets - le deuil, la vieillesse, les rapports familiaux, traités avec une grande finesse - apparaissent et contribuent à tisser une toile de fond plus riche et complexe que l'on ne l'imagine au début. Le style clair et moderne de l'autrice fait surgir grandes lignes et les détails à mesure que l'angoisse monte, même si l'on ne connaîtra jamais tout de Clarissa, qui reste mystérieuse jusqu'à la fin. La dystopie dressée, que l'on n'espère pas trop annonciatrice, pose la question de la sortie du monde robotisé et automatisé : un retour à la vie d'avant et surtout à l'humain est-il encore possible ?


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